Rétro : ce qu’il faut retenir de la saison 2021

 - Romain Vinot

Alors que les joueurs sont déjà en pleine préparation de la prochaine saison, il est temps de dresser le bilan de l’année écoulée. Retour sur les événements marquants de 2021.

Emma Raducanu / US Open 2021 Trophy©Pete Staples / USTA

Du suspense, des surprises, des confirmations, des patrons au rendez-vous et des jeunes qui concrétisent leurs ambitions : la saison a été riche en enseignements. Voici ce qu’il faut retenir de 2021.

Indétrônable Djokovic

Quelle année pour le patron incontesté du circuit masculin ! Numéro un mondial en fin d’exercice pour la septième fois de sa carrière (un record), le Serbe a réalisé une saison absolument exceptionnelle. Pour recoller à ses rivaux historiques au palmarès, il a littéralement écrasé la concurrence lors des trois premières levées du Grand Chelem. Titré pour la neuvième fois dans son jardin australien en prenant notamment le meilleur sur son dauphin Medvedev, il a encore davantage marqué les esprits à Roland-Garros. Arrivé avec le costume d’outsider principal de Rafael Nadal, il a livré un véritable récital en demi-finale avant de renverser une situation plus que délicate face à Stefanos Tsitsipas en finale.

Premier joueur de l’ère Open à remporter au moins deux fois chaque Majeur, « Nole » ne s’est évidemment pas arrêté en si bon chemin. Privé de Wimbledon en 2020 suite à la crise sanitaire, le tenant du titre n’a lâché que deux petits sets, lors de son premier tour et en finale face à Matteo Berrettini… Et trois qui font vingt pour celui qui n’a jamais caché son ambition de devenir le joueur le plus titré de tous les temps.

Une domination sans partage qui laissait penser qu’il pouvait réaliser un Grand Chelem calendaire voire un Golden Slam en cette année olympique. Mais malgré sa forme, ses résultats et son palmarès, le « Djoker » reste humain et a logiquement été rattrapé par la pression à Tokyo puis à New York. S’il n’est pas parvenu à réaliser un exploit historique à Flushing Meadows, Djokovic a gagné l’amour du public. « J’ai ressenti quelque chose que je n’avais encore jamais ressenti dans ma vie. C’était très spécial. Le soutien, l’énergie et l’amour que j’ai reçu du public, je m’en souviendrai toute ma vie » avait-il déclaré après sa finale.

Plutôt discret durant les semaines qui ont suivi, il a de nouveau fait preuve d’une détermination et d’un mental sans failles en remportant un sixième Rolex Paris Masters (un record), son 37ème Masters 1000 en carrière (un autre record). Assuré de terminer une nouvelle fois sur le toit du monde, il s’est incliné au tournoi des maîtres, ce qui n’enlève rien à sa saison en tout point historique. Loin d’être rassasié, « Nole » s’apprête à attaquer 2022 avec l’espoir de faire au moins aussi bien qu’en 2021 : « Il y a toujours une autre échéance, un autre tournoi… Donc on n’a pas vraiment le temps de savourer le succès, parce qu’il faut écrire le chapitre suivant ». Et pour continuer d’écrire sa légende, il devra de nouveau faire face à une très belle concurrence.

Medvedev & Zverev, nouveaux patrons

Autour de Novak Djokovic, un nouveau big three s’est peut-être composé cette saison. Déjà très impressionnant lors de la tournée américaine 2019 et sa fameuse finale d’anthologie à l’US Open contre Rafael Nadal, Daniil Medvedev a franchi de nouvelles étapes cette année. Finaliste malheureux à Melbourne, le Russe est parvenu à se qualifier pour les quarts à Roland-Garros puis les huitièmes à Wimbledon. Mais c’est bel et bien sur dur que le protégé de Gilles Cervara excelle et il l’a pleinement prouvé à l’occasion de l’US Open.

En confiance après sa victoire au Masters 1000 de Toronto, le numéro deux mondial a livré une masterclass de quinze jours, ne perdant qu’un set face à Botic v. de Zandschulp avant de défier l’histoire en remportant son premier Grand Chelem grâce à une victoire en trois sets sur Novak Djokovic. « Pour mon avenir, savoir que j’ai battu un joueur qui comptait 27 victoires en Majeur en un an et qui allait entrer dans l’histoire, savoir que j’ai réussi à le stopper, c’est gratifiant et ça m’apporte beaucoup de confiance » avait-il expliqué le soir de sa plus grande victoire. Une confiance qu’il a encore fait grandir en disputant deux nouvelles finales au Rolex Paris Masters puis au Masters avant de grandement participer au sacre de la Russie en Coupe Davis. Au total, il est le joueur qui a le plus gagné au cours de la saison (63 victoires – 13 défaites). Passé tout près de s’asseoir sur le trône du tennis mondial, Daniil Medvedev aura de nouveau des velléités en 2022.

Une victoire en Grand Chelem, voilà ce qui a manqué à Alexander Zverev pour réaliser la saison parfaite. Demi-finaliste à Roland-Garros et à l’US Open (où il avait déjà disputé la finale en 2020), l’Allemand se rapproche mais n’a pas encore trouvé la formule magique au meilleur des cinq manches. Pas de quoi toutefois noircir son année durant laquelle il a réalisé l’un de ses rêves en devenant champion olympique. Un sacre indiscutable, notamment au vu de sa victoire en demi-finale face à l’immense favori, Novak Djokovic. Une performance XXL qu’il récidivera d’ailleurs quelques mois plus tard à Turin pour s’offrir une nouvelle finale de Masters puis le titre acquis sans conteste face à Daniil Medvedev. Si on ajoute à cette médaille d’or et cette couronne de Maitre, ses deux autres titres en Masters 1000 et sa troisième place mondiale, nul doute qu’il s’agit d’un exercice réussit.

Si ce top 3 mondial n’a laissé que des miettes ou presque au reste du circuit, il faut tout de même mettre en lumière d’autres protagonistes majeurs de la saison écoulée. Vainqueur de cinq tournois (soit seulement un de moins que Zverev, joueur le plus titré) et sélectionné pour la première fois au Masters, Casper Ruud a fait forte impression, tant par la solidité de son jeu que par sa régularité. Titré pour la première fois en Masters 1000 à Miami et demi-finaliste à Wimbledon après ses victoires face à Medvedev et Federer, Hubert Hurkacz a lui aussi fait une entrée fracassante dans le top 10 mondial. Un gotha avec lequel flirte également Cameron Norrie, titré à Indian Wells et qui a progressé de 59 places au classement cette saison. Plus jeunes encore, Jannik Sinner et Carlos Alcaraz (voir ci-dessous) ont également rendu ce cru 2021 particulièrement spectaculaire.

Alexander Zverev kissing his 2021 ATP Finals trophy© Corinne Dubreuil/FFT

Derrière Barty, une hiérarchie moins établie chez les dames

Joueuse la plus titrée (5 trophées) et vainqueur de son deuxième titre du Grand Chelem à Wimbledon (après Roland-Garros en 2019), Ashleigh Barty a terminé une troisième année consécutive au sommet de la hiérarchie mondiale. Une récompense logique tant l’Australienne fait preuve de régularité et semble capable de s’imposer sur toutes les surfaces. Parfois diminuée par les blessures, à l’image de son abandon au deuxième tour Porte d’Auteuil, la n°1 mondiale aurait pu voir sa place menacée par Aryna Sabalenka mais cette dernière a échoué à deux reprises aux portes de la finale, à Wimbledon puis à l’US Open. Des levées du Grand Chelem qui ont toutes connu une championne différente puisque Naomi Osaka, Barbora Krejcikova, Ashleigh Barty et la surprenante Emma Raducanu ont tour à tour récolté les lauriers. Aucun doublé donc, même en prenant en compte les Jeux Olympiques remportés par Belinda Bencic ou le Masters, enlevé d’une main de fer par Garbiñe Muguruza. Si certains observateurs critiquent ce phénomène, d’autres se réjouissent du suspense qu’offre le circuit féminin.

Surtout, le fait qu’une joueuse n’ait pas outrageusement dominé sa discipline en 2021 a permis à de nombreux profils d’éclore et de se (re)faire une place en haut de la hiérarchie. Si elle n’a pas eu le parcours espéré en Grand Chelem, Garbiñe Muguruza a fait un retour fracassant dans le top 3 grâce à ses victoires à Dubaï, Chicago et surtout au Masters de Guadalajara il y a quelques semaines. « Je pense que c’est ma meilleure année. Je n’ai peut-être pas gagné de Grand Chelem mais je sens vraiment que j’ai été plus heureuse, plus stable, moins dramatique et j’en suis vraiment contente » a-t-elle confié après son succès.

Habituée des titres en duo, Barbora Krejcikova a quant à elle réalisé le parcours parfait à Roland-Garros en s’offrant un doublé historique après avoir notamment été en finale à Dubaï. Autre remontée au classement, celle d’Anett Kontaveit, qui s’est montré impériale en fin de saison sur dur. Avec quatre titres glanés entre août et octobre et un total de 48 victoires, elle réalise l’une de ses meilleures saisons, conclue par une belle finale au Masters. A Guadalajara justement, elle a pris le meilleur dans le dernier carré sur Maria Sakkari, qui s’affirme de plus en plus sur le circuit, à l’image de ses deux premières demi-finales de Grand Chelem. Enfin, comment ne pas évoquer le changement de dimension de Paula Badosa, passée en quelques mois d’espoir à vainqueur du tournoi d’Indian Wells puis demi-finaliste des WTA Finals. Mais évidemment, l’événement le plus marquant de l’année chez les dames reste le sacre d’Emma Raducanu.

Leylah Fernandez & Emma Raducanu / US Open 2021©Darren Carroll / USTA

La jeunesse au pouvoir

Les observateurs inquiets pour l’avenir du tennis et la succession présumée compliquée des stars en activité ont été rassurés en 2021. A commencer par le circuit féminin, qui a connu un véritable séisme durant l’US Open. Un dernier tournoi majeur marqué par la performance exceptionnelle d’Emma Raducanu, première joueuse de l’histoire (hommes et femmes confondus) issue des qualifications à remporter un Grand Chelem. Titrée sans perdre le moindre set, la Britannique de 18 ans a tenu en éveil la ville qui ne dort jamais par son jeu, sa joie communicative et sa détermination sans faille pendant trois semaines. Passée de la 338ème à la 19ème place mondiale en six mois, elle vit actuellement un conte de fées qui ne demande qu’à être prolongé.

Une belle histoire partagée par Leylah Fernandez, héroïne malheureuse d’une finale en tout point incroyable. Ses déplacements et sa vitesse d’exécution lui ont permis de triompher d’adversaires prestigieuses, comme Naomi Osaka, Angélique Kerber, Elina Svitolina ou encore Aryna Sabalenka ! Pour elle aussi, l’avenir s’annonce radieux : « J’ai progressé, non seulement d’un point de vue tennistique mais aussi sur le plan moral et émotionnel. Je suis heureuse et j’espère que l’année prochaine sera aussi bonne ». Si elle n’a pas encore eu l’occasion de briller dans un tournoi prestigieux, Clara Tauson (18 ans) s’est également distinguée en remportant trois titres et en intégrant le top 50 mondial.

La jeunesse dorée n’est pas en reste sur le circuit masculin. Annoncé comme une future star du tennis mondial, Carlos Alcaraz (18 ans) a d’ores et déjà bluffé tout le monde en 2021. Le protégé de Juan-Carlos Ferrero a asséné ses coups surpuissants tout au long de l’année jusqu’aux NextGen ATP Finals de Milan, qu’il a remporté en finale face à un autre prodige, Sebastian Korda (21 ans). Titré à Umag, il a également atteint le troisième tour à Roland-Garros avant de disputer son premier quart de finale en Grand Chelem à l’US Open face à Felix-Auger Aliassime (21 ans) dont le statut est déjà confirmé.

Au rayon des satisfactions, difficile de passer à côté de Jannik Sinner. La révélation de l’année 2019 a encore franchi un cap cette saison en remportant quatre titres et en intégrant avec fracas le top 10 mondial. Eliminé en huitièmes de finale à Roland-Garros et l’US Open, il a également disputé ses deux premiers matchs au Masters de Turin, triomphant notamment d’Hubert Hurkacz. Une régularité qu’il voudra rapidement confirmer et qui pourrait servir d’exemple à d’autres futurs talents comme Nakashima, Musetti, Rune ou encore Gaston, qui a ébloui de son talent et de sa détermination le public de Paris.

Sebastian Korda and Carlos Alcaraz posing with their 2021 NextGen ATP Finals trophies© Georgio Maiozzi/Uthopia/FFT