Ruud – Cilic : de l'ombre à la lumière

 - Rémi Bourrieres

Le vainqueur du duel entre le terrien norvégien et le grand fusil croate jouera dimanche la finale de Roland-Garros. Qui l'eût cru ?

Casper Ruud ou Marin Cilic… L'un de ces deux joueurs, qui s'affrontent ce vendredi dans la deuxième demi-finale messieurs (pas avant 17h30), jouera sa première finale de Roland-Garros. Le Norvégien était peu ou prou attendu. Le Croate, pas du tout. Mais leur duel paraît plus indécis que prévu.

On ne va pas s'inventer une vie et affirmer ici qu'on aurait prédit une demi-finale entre Casper Ruud et Marin Cilic. Mais si on refait le film à l'envers, ce qui est toujours plus facile, il n'est après tout pas si surprenant de retrouver un match du dernier carré opposant l'un des plus grands spécialistes mondiaux de la terre battue à l'un des plus grands champions de sa génération.

Peut-être en raison de sa discrétion et de son tennis, certes fort bien léché mais dénué de folie, Marin Cilic n'a jamais été le joueur le plus médiatique du circuit. C'est une injustice profonde, quand on considère qu'il est l'un des cinq seuls joueurs en activité à avoir désormais atteint les demi-finales des quatre Grands Chelems, derrière le Big Four. Mais aussi l'un des rares à avoir réussi à gagner un Grand Chelem (l'US Open 2014) dans cette génération de doux dingues et à disputer deux autres finales (Wimbledon 2017 et Open d'Australie 2018).

Revigoré cette saison par un staff renouvelé, le grand fusil croate est porté ici par une joie de jouer manifeste et un "combo" service/coup droit qui claque à plein régime. Armé de ce véritable marteau-pilon, il a assommé Andrey Rublev en quarts. Mais Casper Ruud, qui partage avec lui le goût de la discrétion et des déclarations policées, lui proposera une équation bien différente avec un tennis de pur terrien et un "spin" beaucoup plus violent infligé à la balle.

Ruud, l'excellence en toute discrétion

Ruud n'a pas l'expérience de Cilic puisqu'il jouera ici sa première demi-finale en Grand Chelem, continuant du même coup d'écrire l'histoire de son pays. Mais ça n'est pas le perdreau de l'année non plus. Il est top 10, a joué le Masters l'an dernier et la finale de Miami cette année, manquant d'ailleurs de nous faire oublier que c'est sur terre, et de loin, qu'il a obtenu ses meilleurs résultats depuis le début de sa carrière. Lui est en tout cas à sa place, celle laissée vacante dans sa partie de tableau par Stefanos Tsitsipas, battu par Holger Rune, que le Norvégien a ensuite "cueilli" lors d'une soirée agitée en quarts de finale.

Vu son classement et sa science de l'ocre, Ruud part sans doute légèrement favori. Mais la flamme qui habite Cilic ici, son expérience des grands rendez-vous et le niveau qu'il est capable d'atteindre rendent cette demie finalement assez dure à lire. Seule certitude : le vainqueur de ce duel ne pourra plus rester caché dans l'ombre des grands favoris dont on a beaucoup plus parlé depuis le début du tournoi. Soudainement, il se retrouvera projeté sous la lumière éclatante des spotlights.