L’empereur et le chevalier

 - Guillaume Baraise

La finale messieurs de Wimbledon propose une affiche contrastée entre l’empereur du tennis mondial Novak Djokovic et le preux chevalier Matteo Berrettini qui va faire face au grand défi de sa première finale en Grand Chelem.

La vingtième ou la première ? Quel que soit le vainqueur dimanche, la finale de Wimbledon affichera un compteur magique pour le vainqueur.

Grand favori, immense même, Novak Djokovic rejoindrait en cas de succès Rafael Nadal et Roger Federer avec 20 titres du Grand Chelem. Là-haut, tout là-haut. La valeur d’une victoire à Londres serait d’autant plus grande pour le Serbe qu’elle le rapprocherait d’un mythique Grand Chelem.



Matteo Berrettini, lui, ouvrirait son palmarès en majeur à 25 ans. Le beau gosse de Rome va devoir réussir un exploit majuscule. Il est déjà le premier Italien à atteindre la finale à Wimbledon, il pourrait devenir le premier Transalpin à s’imposer en Grand Chelem depuis le triomphe d’Adriano Panatta à Roland-Garros en 1976.

Quelques motifs d'espoir pour Matteo...


Pour suivre aussi les traces de ses compatriotes Francesca Schiavone (Roland-Garros 2010) et Flavia Pennetta (US Open 2015), il va devoir renverser l’invincible Djokovic, double tenant du titre, qui n’a plus perdu "à la régulière" à Wimbledon depuis son échec au 3e tour en 2016 (abandon en quart de finale 2017).

Quels sont les motifs d’espoir pour Berrettini ? Son parcours d’abord, même si celui du Serbe, on y reviendra, force le respect. Tête de série n°7, l’Italien a tracé sa route avec détermination jusqu’à la finale, n’abandonnant que trois sets en chemin. En demi-finale, il a estourbi le Polonais Hubert Hurkacz, peut-être encore sonné par sa victoire contre Federer (6/3, 6/0 6/7, 6/4). Le troisième set abandonné fut presque une étourderie, tant Matteo a dominé son sujet.

La confiance et la forme sont donc au point. Le jeu, en mode bulldozer, est également bien réglé. Et puis le n°9 mondial avait secoué Djokovic en quart à Roland-Garros, ne s’inclinant que 7/5 au 4e set. Mais il va devoir d'abord digérer son exploit pour tenter presque l'impossible 48 heures plus tard.

"J'ai du mal à réaliser le fait que je sois en finale, je ne pensais pas que c'était inaccessible, a avoué Berrettini juste après la demi-finale. Je suis très heureux. Cela va être un dimanche particulier pour l'Italie (il fait allusion à la finale de l'Euro Italie-Angleterre). Je vais devoir penser à ma finale. Et si tout va bien, je vais pouvoir regarder le foot dans la foulée."

Djokovic, sans aucun doute


Djokovic, lui, n'aura pas à se préoccuper de l'horaire du foot dimanche. D'ailleurs de préoccupations, il n'en a guère. A l'aube d'un nouveau succès en Grand Chelem, qui serait le 20e donc, le sixième à Wimbledon, le troisième titre de rang à Londres, le Serbe a allumé tous les voyants au vert.

Pourtant en demi-finale, le fougueux Denis Shapovalov a tout fait pour prendre d'assaut le cuirassé "Nole". Rien à faire, le Canadien a servi pour le gain du premier set et a eu des occasions au début des 2e et 3e sets, mais il a pris la leçon (7/6, 7/5, 7/5). Comme tous les autres ou presque, même si l'impudent Britannique Jack Draper avait osé s'aventurer à chaparder au n°1 mondial son tout premier set du tournoi.

Depuis, Djokovic est en démonstration. C'est peut-être ce succès contre Shapolavov qui est le plus impressionnant de tous. Secoué mais jamais vacillant, le n°1 mondial a fait parler toute sa maîtrise et sa confiance dans les fins de set. Difficile de l'imaginer douter dimanche à l'heure d'affronter un "bleu" en finale de Grand Chelem.

© Corinne Dubreuil / FFT

Cette septième finale à Wimbledon s'annonce presque "facile" sur le papier pour Djokovic, en tout cas davantage que celles face à Roger Federer, Rafael Nadal ou Andy Murray. Le scénario d'un cavalier seul comme ce fut le cas face au Sud-Africain Kevin Anderson en 2018 n'est pas à exclure...

"Tout est possible en finale, l'expérience est de mon côté mais Berrettini est en grande forme, je m'attends à une grosse bataille, prophétisait Djokovic. Je ne suis pas sûr d'avoir le soutien de la foule. C'est la première de mon adversaire en Grand Chelem, il sera outsider, les gens aiment ça. Je dois me concentrer sur moi-même et ce que j'ai à faire."

Même dans les propos forcément prudents du Serbe se dégagent une certaine forme de confiance bien logique compte tenu du "décorum" de la finale...