Kasatkina : "Comme à la maison"

 - Alexandre Coiquil

Sa palette riche est faite pour l'ocre : la Russe, 21 ans, exprime son amour pour "Roland" et la terre.

Si vous ne l'avez encore jamais vue jouer, courez vite combler ce manque. Finesse et punch à la fois : Daria Kasatkina, 21 ans, présente l'un des jeux les plus complets vus sur le circuit féminin ces dernières années. Rencontre avec une 14e joueuse mondiale qui s'épanouit sur terre battue.

Ses débuts au tennis

"C’était avec mon grand frère Aleksandr. Il jouait pour le plaisir et, un jour, il m’a emmenée sur le court avec lui. J’ai aimé tout de suite. C’était comme un appel au jeu, "game ! game ! game !" J’ai trouvé ça très facile, il fallait juste frapper la balle pour la mettre là où l’adversaire n’était pas (rires). C’est le seul sport que j’ai jamais pratiqué."

"J'ai commencé le tennis en Russie, je me suis entraînée en Slovaquie, aujourd'hui mon entraîneur est le Belge Philippe Dehaes : je me considère comme une joueuse du monde entier !"

Son rapport à la terre battue

"J’ai découvert la terre battue assez tard, vers 10 ans, je crois. Je ne suis pas comme les Européens qui grandissent sur terre battue. En Russie, nous n’avons pas beaucoup de courts en terre. Mais dès le début, j’ai adoré cette surface. J’ai trouvé ça très intuitif. On peut y faire tellement de coups différents. Maintenant, je préfère même la terre aux surfaces dures."

L'art de la glissade sur terre battue expliqué par les champions

Roland-Garros

 "Je joue à Roland-Garros depuis l’âge de 15 ans. J’ai gagné le titre junior ici, en 2014. Depuis, c’est devenu mon tournoi favori, favori, favori, favori (rires) ! Je me souviens de tout : les premiers tours contre des joueuses d’Asie dont j’ignorais tout, le quart de finale contre ma grande amie Iryna Shymanovich et puis les deux derniers matchs contre Marketa Vondrousova et Ivana Jorovic. J’étais tellement nerveuse sur ces deux matchs… et après, j’ai gagné. Le dernier coup droit, c’était extraordinaire. A l'époque, je n'avais pas eu beaucoup le temps de savourer parce que j'avais enchaîné tout de suite avec mes premiers ITF 25000$ mais, depuis, à chaque fois que je reviens ici, je me sens comme à la maison."

Daria Kasatkina Roland-Garros girls singles champion / championne simple juniors filles 2014.© Sindy Thomas / FFT
Son jeu, riche et varié

"Beaucoup de gens me disent que mon jeu est un peu différent par rapport à celui des autres filles. Peut-être. Je fais des slices, des amorties, je varie les zones et les effets... C’est quelque chose de totalement naturel chez moi. Je suis née avec ce jeu ! J’aime faire des choses différentes avec la balle. C’est ce côté ludique qui m’a plu quand j’étais enfant, et aujourd’hui, c’est une caractéristique que j'essaie d'entretenir. C’est un challenge car il est plus difficile de produire ce jeu sur le Tour qu'en juniors. Le jeu en pros est plus puissant, plus physique. Donc il faut que je m’adapte et que je trouve de nouvelles façons de produire mon tennis. Le développement de mon jeu et de ma solidité mentale est quelque chose d'intéressant, à mener avec toute mon équipe. C’est un peu comme un jeu vidéo."

"Quand je dois frapper un coup, je vois tellement de possibilités... le truc c'est d'en choisir une parmi elles, et c'est parfois difficile ! C'est une décision instantanée à prendre, pour laquelle vous devez juste vous laisser aller à ressentir les choses, instinctivement. C'est pour ça aussi que mon jeu demande de la confiance. Quand je suis en confiance, tout est facile."

Daria Kasatkina Maria Sakkari Roland-Garros 2018.© Nicolas Gouhier / FFT
Son tournoi

"C’est une grande satisfaction d’être en huitièmes de finales. J’étais un peu nerveuse (contre Maria Sakkari, au troisième tour, ndlr) car j’avais déjà laissé passer deux fois ma chance à ce stade les deux dernières années. Je suis très contente de l’avoir saisie cette fois. Je suis très satisfaite de la manière, aussi. Par exemple, d’avoir su gérer le match tardif du deuxième tour contre Kirsten Flipkens, avec peu de lumière, plusieurs changements de programmation dans la journée… et malgré tout, j’ai trouvé les ressources pour ne pas me laisser affecter par ça. Ce match-là, je ne sais pas si je l’aurais gagné avant."

Son chouchou

"Rafa ! C’est mon idole depuis que j'ai 7 ans. Toute la partie "coup droit lifté" de mon jeu, c'est sans doute à lui que je la dois. J'apprécie autant son coup droit que sa rage de vaincre. La première fois que je l’ai vu jouer, il se battait sur tous les points. Je n’avais jamais vu ça. Et le plus impressionnant, c'est qu'il continue à le faire aujourd'hui, toutes ces années plus tard !'

Daria Kasatkina Roland-Garros 2018© Nicolas Gouhier / FFT