Retour aux affaires

 - Guillaume Willecoq

Roland-Garros a clairement eu de quoi rassurer Maria Sharapova et Serena Williams.

Serena Williams Maria Sharapova 3e tour Roland-Garros 3rd round.

Les deux seules multi-gagnantes de Roland-Garros en activité (trois titres pour Serena Williams, deux pour Maria Sharapova) ont signé un tournoi 2018 plus qu’encourageant dans leur entreprise de comeback. On fait le bilan.

Serena Williams, déjà compétitive
  • La situation

Une grossesse, et ses complications ; l’âge (bientôt 37 ans), qui ajoute à l’entreprise une dimension de contre-la-montre ; la terre battue, cette surface exigeante sur laquelle elle n’avait pas joué depuis deux ans, pour effectuer son "vrai" retour : si Serena Williams est une femme de défi, celui qu’elle s’est actuellement fixé est à la hauteur de la championne aux 23 titres du Grand chelem.

  • Le tournoi

Après une tournée Indian Wells – Miami aux allures de reprise de contact (deux victoires, deux défaites) après 16 mois sans compétition officielle, c’est une toute autre Serena que l’on a vu à Roland-Garros, montant en puissance au fil des tours : une bataille de services face à Krystina Pliskova (7/6 6/4), un rude bras-de-fer face à la talentueuse Ashley Barty (3/6 6/3 6/4), et puis ce match dominé de la tête et des épaules face à l’Allemande Julia Görges, 11e mondiale et très à l’aise sur terre (6/3 6/4).

Si l’on ne savait pas où en était Serena Williams avant le début du tournoi, sa première semaine parisienne a montré une joueuse capable, sinon de gagner le titre, au moins d’en être arbitre dans les derniers tours. C’était avant une blessure au muscle pectoral contractée en double à la veille des huitièmes de finale, contraignant l’Américaine au forfait face à Maria Sharapova. Pas de quoi cependant ternir la bonne impression générale laissée par la reine Serena sur sa "moins bonne" (trois titres à Roland-Garros quand même !) surface.

  • Les perspectives

Pour quelqu’un ayant si peu joué depuis un an et demi, il n’est pas illogique que l’enchaînement de six matchs (trois en simple et trois en double) en six jours soit douloureux. Dans la mécanique de haute précision du sportif de haut niveau, habitué à composer avec les pépins physiques, cette connaissance des limites du moment fait même souvent partie du processus. Le tout est de s’arrêter à temps et, là-dessus, Patrick Mouratoglou s'est montré rassurant suite à l'IRM passée par sa joueuse : "La blessure est musculaire mais ce n'est pas une déchirure. On compte deux semaines de repos puis deux semaines pour faire de la remise en forme et améliorer sa vitesse sur le court."

Un mois, soit le laps de temps séparant le forfait de Serena Williams à Roland-Garros du coup d’envoi de Wimbledon. Le compte à rebours est lancé : "Je pense qu'elle est compétitive. Roland-Garros nous a montré que son niveau et sa forme physique sont de retour, poursuit Mouratoglou. De plus, à Wimbledon elle pourra compter sur son service qui donnera sa pleine mesure sur gazon".

Et quand bien même Wimbledon arriverait un peu vite, Serena Williams aura encore un Grand chelem à jouer en 2018, chez elle, à l’US Open. Ce qui est sûr, c’est que Roland-Garros a donné corps à son ambition : la course-poursuite derrière le record de victoires en Grand chelem de Margaret Court a bel et bien repris.

Maria Sharapova, enfin régulière
  • La situation

A force de banaliser la notion de comeback, Roger Federer et Rafael Nadal ont fait perdre de vue à quel point cela n’avait rien d’évident de retrouver les plus hautes cimes quand on les a quittées. Même une joueuse du calibre de Maria Sharapova souffre ainsi pour retrouver le niveau qui était le sien avant sa suspension de 15 mois. Toujours capable de coups d’éclats (demi-finaliste à Stuttgart dès son tournoi de rentrée en avril 2017, victoire sur Simona Halep au premier tour de l’US Open), la Russe n’a jamais retrouvé la régularité (un seul tournoi remporté, à Tianjin fin 2017, pour quatre défaites dans des premiers tours). Du moins jusqu’à cette campagne de terre battue 2018, qui a confirmé à quel point l’ocre était devenu la meilleure surface de la Russe.

  • Le tournoi

C’est toute la campagne de terre qu’il convient de prendre en compte pour souligner la progression de Maria Sharapova : quart de finaliste à Madrid, demi-finaliste à Rome et quart de finaliste à Roland-Garros. Une constance inédite depuis son retour il y a un peu plus d'un an. En point d’orgue, la double gagnante de Roland-Garros (2012, 2014) fait de son succès sur Karolina Pliskova au troisième tour (6/2 6/1) son match référence : "C’est dans ce type de grands rendez-vous que vous voulez sortir votre meilleur tennis. Et c’est ce que j’ai fait, en étant agressive dès le retour, en prenant ma chance sur les balles de break… C’est moi qui ai été chercher le match plus qu’elle qui me l’a donné."

  • Les perspectives

Même si sa défaite sèche face à Garbiñe Muguruza en quarts de finale a un peu terni le bilan, et rappelé que le chemin jusqu'à un sixième titre en Grand chelem restait long, Maria Sharapova a incontestablement fait un grand pas en avant en ce printemps ocre. Elle l’achève d’ailleurs à la 23e place, elle qui était 52e au début de Madrid. Une progression qui lui garantit une tête de série lors des prochains tournois, et devrait donc lui faciliter la vie dans les premiers tours… sauf à y retrouver Serena Williams en cas de tirage au sort taquin !