Interview - Coco Gauff : "J’ai encore des choses à faire à Roland-Garros"

"En vieillissant, j’ai l’impression d’aimer ce sport encore plus qu’à 17 ou 18 ans, juste parce qu’à l’époque je ressentais plus de pression étant donné la façon dont je suis arrivée sur le circuit" a-t-elle déclaré aux journalistes à Indian Wells cette semaine.

Coco Gauff a émergé sur la scène internationale à l’âge de 15 ans, alors qu’elle avait atteint les quarts de finale de Wimbledon en sortant des qualifications, battant au passage la légendaire Venus Williams.

À 18 ans, elle a disputé sa première finale de Grand Chelem en simple, à Roland-Garros. À 19 ans elle a remporté son premier titre majeur à l’US Open en 2023. Et l'an dernier, Coco Gauff faisait partie des porteurs du drapeau américain lors des Jeux olympiques de Paris, aux côtés notamment de LeBron James.

Alors qu’elle aura 21 ans ce jeudi, elle revient sur les plus grandes leçons tirées de ces douze derniers mois.

"Je crois qu’il faut juste accepter les hauts et les bas dans une carrière. Je pense que parfois, dans le sport, on veut rester sur une dynamique positive et surfer sur cette vague, mais avec une saison aussi longue que celle du tennis, c’est impossible d’être toujours au sommet. Il y aura forcément des moments plus compliqués", a-t-elle ajouté.

"Il faut simplement tenir bon dans ces moments difficiles et en tirer du positif. Ne pas se dire que le reste de la saison sera du même acabit. J’ai l’impression que je suis capable rebondir, je l’ai déjà fait. Je pense qu’il suffit d’un match ou deux pour retrouver la confiance".

C’est cette mentalité qui a permis à Gauff de se remettre de deux défaites consécutives au premier tour à Doha et à Dubaï le mois dernier pour s’imposer au quatrième tour d’Indian Wells, où elle affrontera Belinda Bencic ce mercredi.

Après une fin de saison fulgurante en 2024, Gauff a commencé l’année 2025 par neuf victoires consécutives, enchainant un sans-faute (5-0) lors de la United Cup avec les États-Unis avant de tomber en quarts de finale à l’Open d’Australie.

"Quand on commence bien la saison, il ne faut pas chercher à simplement maintenir son niveau. J’essaye de traiter chaque partie de la saison comme des étapes différentes. Donc, peu importe ce qui se passe de bien ou de mal, c’est une chance de redémarrer", a-t-elle confié à Rolandgarros.com dans une interview accordée le mois dernier à Dubaï.

Avec une nouvelle chance de démarrer un tournoi de la meilleure des manières, Gauff a voyagé d’un désert à l’autre. Mais avant d’atterrir à Indian Wells, elle a fait un détour à Los Angeles pour assister aux Oscars. Habillée sur-mesure par Miu Miu, elle a côtoyé l’élite hollywoodienne pour une soirée d’évasion. 

"C’était cool d’être dans un espace différent et dans un monde différent", raconte Gauff, qui a notamment échangé avec Samuel L. Jackson et Ben Stiller lors de la cérémonie.

"C’était vraiment amusant de rencontrer tous ces gens, et j’ai vraiment été surprise de voir que la plupart d'entre eux me connaissaient, c’était bizarre".

Si cela lui a semblé étrange, cela n’a rien de surprenant pour nous !

"Mon objectif, c'est d'être n°1 mondiale, point final"

Cela a été une grande année pour les Américaines en tennis. Madison Keys a remporté son tout premier titre de Grand Chelem à l’Open d’Australie, Amanda Anisimova s’est emparé de sa première couronne WTA 1000 à Doha et McCartney Kessler, Jessica Pegula et Emma Navarro ont toutes brillé dans d'autres tournois.

Quatre américaines figurent actuellement dans le Top 10 – dont trois dans le Top 5 – avec Gauff en cheffe de file, devant Pegula, Keys et Navarro. Être la première américaine n’est pas source d’inquiétude pour elle, surtout parce qu’elle sait que ce n’est pas son but final.

"Honnêtement, ça n’a jamais signifié quoi que ce soit pour moi. J’ai l’impression que tout le monde en parle sur internet, et pour moi, cela ne signifie absolument rien. Je n’y prête pas attention. Je m’en fiche", affirme-t-elle.

"La raison pour laquelle cela ne veut rien dire, c’est parce que mon objectif, c'est d’être n°1 mondiale, point final".

"Mais évidemment, j’ai de la chance d’être entourée par une telle concurrence dans mon pays. On est toutes amies et on se soutient mutuellement. J’étais vraiment heureuse de voir Madison, puis Amanda gagner – deux personnes qui, selon moi, méritent largement ces titres".

Inspirée par Madison Keys

Le triomphe de Keys a Melbourne a été particulièrement inspirant pour Coco Gauff, compte tenu de la façon dont sa compatriote y est parvenue. À l’approche de son 30e anniversaire, Keys a changé de raquette, modifié son mouvement de service et adopté un nouvel état d’esprit qui l’a aidée à enfin décrocher un Majeur.

Gauff a elle-même entrepris des ajustements depuis qu’elle a fait appel à Matt Daly à son équipe d’entraîneurs l’automne dernier. Elle a modifié sa prise et fait des modifications sur son service, qui reste un élément de son jeu en constante progression.

"C’était vraiment génial. J’étais à fond derrière elle, elle mérite tellement ce titre", a-t-elle déclaré à propos du triomphe de Keys à l’Open d’Australie.

"C’est vraiment inspirant, simplement parce que je suis aussi dans ce processus (de faire des changements), mais aussi parce qu'elle s'y est engagée à un moment que les gens considèrent peut-être un peu tard dans sa carrière".

À la question de savoir si la place de numéro 1 est une priorité pour elle cette année , elle répondu : "Oui et non. Je n’ai jamais été attirée par les classements. Vraiment, je veux juste gagner les Grands Chelems. Mon père m’a toujours dit : ’Le classement viendra avec les titres en Grand Chelem'".

"Je pense donc que c'est plutôt ça que je recherche. Et si je gagne un Majeur cette année sans devenir n°1, je serais satisfaite. Je serai même plus heureuse que si je devenais n°1 sans en gagner un".

"Je me considère comme une bonne joueuse sur terre battue"

Roland-Garros est un tournoi qui lui tient particulièrement à cœur puisque c'est là qu'elle a perdu en finale, contre Iga Swiatek, en 2022. Cette dernière a remporté quatre des cinq dernières éditions de Roland-Garros – dont trois consécutives – et a battu Gauff sur la terre parisienne à plusieurs reprises en 2022, 2023 et 2024. Aujourd’hui, pour soulever la Coupe Suzanne-Lenglen, il semble qu’il faille inévitablement passer par la Polonaise.

Est-ce ainsi que Coco Gauff voit les choses ?

"Oui et non", réfléchit-t-elle.

"Dans nos faces-à-faces, j'ai toujours seulement voulu gagner, point final. Je n'ai pas vraiment fait attention aux statistiques, pas vraiment réfléchi à tout cela. Je me considère comme une bonne joueuse sur terre battue, et je sais que si je veux gagner ce tournoi, il faudra probablement la battre".

Après sept premières défaites, Gauff a fini par améliorer son bilan face à la polonaise (3-11). Mais ses trois victoires ont toutes eu lieu sur dur.

"Je pense qu’il s’agit plutôt de m’entraîner pour être la meilleure version de moi-même, et je crois que c’est ainsi que j’ai été entraînée", a-t-elle encore ajouté.

"Et avec mes résultats contre elle dans le passé, ça ne s’est pas passé comme je le voulais. Elle a un talent incroyable, sur n’importe quelle surface, mais surtout sur terre. Ce serait donc un objectif de gagner ce tournoi simplement parce que j’ai réussi à atteindre la finale. J’ai le sentiment d’avoir encore des choses à faire à Roland-Garros. Et oui, elle est certainement la personne à battre quand il s’agit de jouer là-bas".

Gauff est encore jeune, mais étant donné la précocité de ses débuts, c’est déjà sa 7e saison sur le circuit professionnel.

Comme l’épuisement devient un problème grave et courant dans tous les sports professionnels, en particulier le tennis, de nombreux joueuses et joueurs sont devenus plus prudents lorsqu’il s’agit de leurs emplois du temps – certains ont même choisi de prendre des pauses prolongées afin de préserver leur bien-être mental et physique.

Coco Gauff n’a, jusqu’à présent, pas ressenti ce besoin, mais elle sait que c’est inévitable compte tenu du rythme effréné que peut avoir le calendrier du tennis.

"Je suppose que le plus important est de ne pas être physiquement épuisé, simplement parce qu’au bout du compte, quand il sera temps de prendre ma retraite, je veux m’assurer que je le fais selon mes conditions et pas à cause d’une blessure ou quelque chose du genre", dit-elle.

"Donc je pense que c’est plus une question de protéger mon amour pour le sport et j’espère qu’il me rendra la pareille".