Les 5 questions que pose la victoire de Coric sur Federer

 - Guillaume Willecoq

Le succès du Croate de 21 ans sur le Maestro en quête de Decima à Halle mérite qu'on s'y arrête.

Borna Coric and Roger Federer posing with the trophy in Halle / Borna Coric bat Roger Federer en finale du tournoi de Halle.© F. GENTSCH / DPA / AFP

Événement à Halle, où le Croate Borna Coric a privé Roger Federer de sa première Decima (la passe de dix) dans un tournoi. Voici les cinq questions induites par ce succès de Coric, 21 ans, sur la légende Federer.

Coric : le prodige est-il arrivé à maturité ?

Borna Coric avait été le jeune le plus précoce de sa génération, finissant l'année 2014 en tant que plus jeune membre du Top 100 pour sa première saison professionnelle. La suite a été moins fulgurante pour le Croate, relégué dans l’ombre notamment d’un de ses grands rivaux des catégories de jeunes, Alexander Zverev. Mais sa saison 2018 le repositionne aux avant-postes : demi-finaliste à Indian Wells, quart de finaliste à Miami, le voilà qui remporte, à 21 ans, le deuxième titre de sa carrière à Halle (après Marrakech l'an passé, sur terre battue).



Surtout, en battant Roger Federer en finale, Coric confirme être un redoutable joueur de grands matchs, lui qui a déjà battu par deux fois Rafael Nadal et Andy Murray, et mène même 3-1 dans son face-à-face avec Zverev. Au total, il est sorti vainqueur d’un tiers de ses matchs face à des joueurs du Top 5 (6 victoires – 13 défaites). Sa nouvelle collaboration avec l’Italien Riccardo Piatti (Ivan Ljubicic, Richard Gasquet, Milos Raonic) semble lui avoir permis d’ajouter la régularité à cette propension aux coups d’éclat : le voilà aux portes du Top 20 (21e), seul Zverev étant plus jeune que lui (de cinq mois) parmi les 20 joueurs le précédant.

Les Héritiers sur leur lancée ?

La tendance se confirme : avec Borna Coric qui fait son entrée dans les 10 premiers au classement Race depuis janvier, les moins de 25 ans prennent leurs aises aux avant-postes. Les deux héros de la terre battue Alexander Zverev (3e) et Dominic Thiem (5e) mènent le train, suivis donc de Coric (9e), Edmund (11e) et Chung (12e). Pour eux, et à des degrés divers évidemment, ne leur manque plus qu’une chose : la concrétisation en Grand chelem.   



Federer, rentrée réussie ?

Un titre à Stuttgart, une finale à Halle, 8 matchs gagnés, 1 seul perdu, et des succès sur Nick Kyrgios et Milos Raonic sur leur surface favorite : l’énoncé des faits acte un retour à la compétition abouti pour Roger Federer. Pourtant, puisque le diable se niche dans les détails, force est de reconnaître que sa semaine de reprise à Stuttgart a (paradoxalement ?) été plus concluante que la suivante à Halle : plus maître de son sujet face à des adversaires a priori plus dangereux, le Suisse avait sorti le grand jeu pour son tournoi de reprise, après trois mois sans compétition. Son niveau de jeu a été autrement plus erratique à Halle, le Bâlois passant d’ailleurs à un point de disparaître dès le deuxième tour face à Benoît Paire.  



De là à s’inquiéter pour le Suisse… Le gazon reste une surface plus aléatoire qu’ailleurs, et la finale de Halle, gagnée par Coric alors que Federer a perdu moins de points sur son service et en a gagné plus que son adversaire à la relance, vient rappeler que le jeu sur herbe est avant tout affaire de réalisme. La finale s’est jouée sur quatre points – deux balles de set non converties pour le Suisse au premier acte, celle convertie par le Croate ensuite, et le break réalisé au troisième set par Coric… à sa première occasion de la partie ! Et voilà comment tourne un match sur gazon. Peu importe que Federer ait marqué 8 points de plus que Coric sur l'ensemble du match... 

Federer a t-il passé sa dernière semaine à la place de n°1 mondial ?

A quelques semaines de fêter ses 37 ans, c'est forcément une question qui se pose. En perdant son titre à Halle, Roger Federer a abandonné la première place mondiale à Rafael Nadal. Et le chassé-croisé que se livrent les deux champions depuis janvier risque de ne pas reprendre de sitôt : après que Rafael Nadal a défendu au point près son monumental pécule ATP sur terre battue, c’est maintenant au Suisse de rentrer dans la zone où il ne peut rien gagner… et tout perdre. En tant que tenant du titre de Wimbledon, il défend 2000 points, Nadal seulement 180 (un huitième).



Sachant qu’à cette heure "Rafa" a déjà pris près de 1500 points d’avance à la Race depuis janvier (5040 contre 3660), et qu’en outre Alexander Zverev est en embuscade juste derrière (3495), la marge de manœuvre se réduit pour le Suisse. Et s’il ne manque pas une occasion d’affirmer que cette place de n°1 n’est plus un objectif direct, n’en demeure pas moins que sa dernière semaine passée sur le trône sera une date symboliquement forte de son aventure sportive exceptionnelle. La 310e (record absolu, évidemment) était-elle cette dernière ?

Federer – Djokovic, même résultat... même combat ? 

Le premier jouait pour son 99e titre, le second, au Queen’s, jouait sa 99e finale. Les deux ont perdu… mais, pour Novak Djokovic aussi, le résultat est nettement encourageant. On l’avait quitté agacé (vexé ?) suite à sa défaite face à Marco Cecchinato en quarts de finale de Roland-Garros. Pourtant, l'ancien n°1 mondial est bel et bien sur la bonne voie, et sa finale au Queen’s (sa première finale sur le circuit depuis un an !) en atteste : net vainqueur notamment de Grigor Dimitrov au deuxième tour (6/4 6/1), il a ensuite fallu un très bon Marin Cilic pour le stopper en finale, en trois sets (et non sans que Cilic ne doive sauver une balle de match au deuxième set, chose faite sur un service gagnant). Le voilà 13e à la Race, avec 1020 points de ses 1355 points pris sur ses trois derniers tournois.