Mirra Andreeva, vent de fraîcheur sur la Caja Magica

 - Romain Vinot

Qualifiée pour les huitièmes de finale le jour de ses 16 ans, la jeune pépite affole déjà les compteurs.

Mirra Andreeva / Madrid 2023©Antoine Couvercelle / FFT

Plus jeune joueuse de l’histoire à atteindre les huitièmes de finale d’un tournoi WTA 1000, Mirra Andreeva a fait une entrée très remarquée sur le circuit professionnel. Actuellement sur une série de 16 victoires consécutives, la joueuse – invitée par les organisateurs et 194e mondiale avant son premier tour – va se mesurer à Aryna Sabalenka cet après-midi. Sans appréhension aucune.

Records et débuts de rêve

Pour bien comprendre le mental et la trajectoire du phénomène, il faut remonter quelques mois en arrière. Engagée sur le circuit juniors, Mirra a atteint la finale du tournoi de Traralgon avant de récidiver 10 jours plus tard à l’Open d’Australie. Renversée par Alina Korneeva au terme d’une rencontre très disputée (6/7(2), 6/4, 7/5), la joueuse alors âgée de 15 ans aurait pu marquer le pas, mais que nenni. "Ça a été un match très difficile pour moi, a-t-elle expliqué à WTA Insider. J’ai eu de nombreuses opportunités mais je n’ai pas réussi à les saisir. Mon coach m’a dit que dans cinq ans, je ne me rappellerai plus de mon adversaire, ni même d’avoir disputé la finale de l’Open d’Australie. Ça m’a aidé et même si je m’en souviens encore et que c’est douloureux, c’est du passé maintenant".

Plutôt que de se morfondre, elle a donc pris le taureau par les cornes en enchaînant une nouvelle finale au Caire avant d’enfoncer la porte du monde professionnel. Issue des qualifications, elle a remporté le tournoi ITF W60 de Chiasso avant de réaliser un back-to-back made in Suisse à Bellinzona, devenant ainsi la première joueuse à gagner deux compétitions de ce type à moins de 16 ans. De quoi obtenir une wild-card pour le tableau principal de Madrid et la transformer en conte de fées.

En prenant le meilleur sur la finaliste de l’US Open 2021 Leylah Fernandez lors de son entrée en lice (6/3, 6/4), elle est d’abord devenue la troisième plus jeune joueuse à triompher en grand tableau de WTA 1000, après Coco Gauff et Cici Bellis. Un succès de prestige magnifié par deux nouvelles victoires en deux sets face à des joueuses du Top 20 : Beatriz Haddad Maia (7/6(6), 6/3) et Magda Linette (6/3, 6/3). Un parcours de rêve et un nom inscrit dans les livres d’histoire puisqu’elle est désormais la plus jeune joueuse à avoir atteint les huitièmes de finale d’un événement de cette importance.

Inspirée par sa sœur et entraînée en France

Et justement, si le nom d’Andreeva vous est familier, c’est peut-être parce que vous avez vu jouer sa sœur Erika, finaliste de Roland-Garros juniors en 2021 et désormais classée 114e mondiale. Le parfait exemple à suivre depuis le plus jeune âge pour Mirra. "Erika a commencé à jouer à 5 ou 6 ans, peut-être même plus tôt, poursuit-elle. Comme je suis sa petite sœur, j’ai toujours été sur le terrain, depuis l’âge de 2 ans. Je ramassais les balles mais j’ai joué plus tard, à 6 ans […] Elle m’aide beaucoup en me donnant des conseils et en me motivant". Des montées en puissance similaires – malgré le style bien différent des deux joueuses – qui prêtent à confusion, à l’image de ce post du tournoi madrilène à l’issue du troisième succès de Mirra.

Toujours ensemble, les deux teenagers ont choisi la France pour poursuivre leur progression. "On savait que Daniil Medvedev s’était entraîné à Cannes. Notre agent a parlé des académies et nous avions le choix entre ici et la Rafa Nadal Academy. Nous avons fait un essai d’une semaine et ça m’a plu donc nous avons choisi de travailler avec eux depuis le début de l’année 2022".

"Eux", ce sont Jean-Christophe Faurel et Jean-René Lisnard et c’est encore ce dernier qui parle le mieux de sa protégée. "Attention, on a affaire à prodige, explique JRL dans les colonnes du journal L’Equipe. J’appelle ça un projet éponge. Elle a cette soif d’apprendre et cette maturité qui font qu’elle incarne ce dont rêvent tous les entraîneurs : elle prend les conseils parfaitement comme il faut, elle comprend la mesure. Pas besoin de lui apprendre à jouer au tennis. Elle a du Daniil en elle, sauf qu’elle n’a que 16 ans ! Et puis, chaque matin, elle se réveille, tout va bien".

Confiance et variations

Celle qui a fêté son 16e anniversaire par un succès sans conteste contre la demi-finaliste du premier Grand Chelem de la saison a déjà pleinement conscience de ses qualités, comme elle l’a expliqué sur le plateau de Tennis Channel. "Je ne suis pas vraiment surprise par mon niveau, parce que je sais comment je peux jouer sur le terrain. Mais bien sûr, je ne m’attendais pas à être ici et à aller aussi loin".

Capable de revers long de ligne extrêmement efficaces, Mirra Andreeva n’hésite pas à utiliser de nombreuses variations et à adapter son jeu, qu’elle compare à celui de la Tunisienne Ons Jabeur. "Je peux peut-être comparer mon jeu à celui d’Ons Jabeur parce que je change beaucoup de rythme et j’utilise souvent le lift. Je fais aussi beaucoup d’amorties".

Mirra Andreeva / Madrid 2023©Antoine Couvercelle / FFT

Les yeux qui brillent

Au-delà de ses impressionnantes victoires et de son parcours d’ores et déjà historique, Andreeva profite pleinement de son aventure et de ses débuts chez les grands. Un véritable vent de fraîcheur sur le circuit amené par une jeune pépite dont les réponses sont toujours franches. Une sincérité qui nous a d’ores et déjà offert un échange savoureux avec Andy Murray. "L’atmosphère qui règne ici est vraiment spéciale. Vous déjeunez avec toutes ces stars… Par exemple, tu vois Andy Murray, tu vois son visage et il est tellement beau dans la vraie vie. Il est incroyable !".

Peu importe son résultat du jour face à la numéro 2 mondiale, Mirra Andreeva s’est fait un nom (et un prénom) et restera comme la belle histoire de ce printemps sur ocre.