Implacable Nadal

Trop solide, trop expérimenté, trop fort… L'Espagnol n'a laissé aucune chance à Casper Ruud pour décrocher son 14e sacre à Roland-Garros. Sa légende semble éternelle.

 - Rémi Bourrieres

À 36 ans, Rafael Nadal est devenu le vainqueur le plus âgé de l'histoire de Roland-Garros, où il a triomphé pour la 14e fois en surclassant un Casper Ruud trop timoré pour sa première à ce niveau (6/3, 6/3, 6/0 en 2h18), ce dimanche. On le pensait blessé, fatigué, exténué. Et puis non. Rafael Nadal est toujours là. Implacable. Immortel.

Au bout de ce qui fut probablement son Roland-Garros le plus dur, il y avait Ruud… Rafael Nadal n'a laissé aucune chance au "rookie" norvégien, beaucoup trop timoré, comme on pouvait le craindre pour lui, à l'heure de disputer sa première finale majeure, qui plus est face à son idole. L'Espagnol l'a surclassé de bout ou en bout, ou presque, pour enfoncer encore un peu plus le clou de sa légende éternelle et remporter ici son 14e Roland-Garros, son 22e Grand Chelem au total. Peut-être celui que l'on attendait le moins.

La finale ? On va être honnête, il n'y en a quasiment pas eu. Sans paraître au top de sa forme, loin de là, en tout cas loin du niveau qu'on lui avait vu pour battre son grand rival Novak Djokovic en quarts de finale, Rafael Nadal donna vite le sentiment qu'il ne pouvait pas lui arriver grand-chose. Ou plutôt que ce Ruud-là ne pouvait pas lui faire mal.

Ça n'était pas non plus le Ruud des jours précédents, on en était même très loin, là encore. Sur l'ensemble de leurs matchs depuis le début de la quinzaine, à durée de jeu quasiment équivalente (à six minutes près), le Norvégien avait frappé plus de coups gagnants (259 contre 204) et moins de fautes directes que l'Espagnol (138 contre 166). Ce dimanche, la feuille de stats rendit un verdict totalement opposé : 16 coups gagnants pour 26 fautes directes pour Ruud ; 37-18 pour Nadal. Tout est dit, à peu près, dans ces chiffres.

Ruud se "plombe" d'entrée

Le seul espoir pour Casper aurait sans doute été de parvenir à instaurer d'entrée le combat. À l'inverse, il se "plomba" en concédant son premier jeu de service (2-0). Nadal le lui rendit de suite en commettant deux inquiétantes doubles fautes. La bête était-elle blessée ? Le taureau écorné ? Le pied fragilisé ? Évidemment, cette question était principalement sur toutes les lèvres avant la finale. Le Majorquin donna vite la réponse en rebreakant tout de suite pour, cette fois, ne plus lâcher son avantage et conclure ce premier set 6/3, sur un retour de revers catapulté directement dans le micro de l'arbitre.

Hormis ce tir d'orfèvre, Casper Ruud ne parvenait désespérément pas à trouver la cible. Le seul moment où il put sortir la tête de l'eau fut quand il écarta trois balles de break d'entrée de 2e set pour prendre dans la foulée le service adverse et se détacher 3-1. Un léger vent de suspense rafraîchit alors la moiteur de l'atmosphère. Mais il retomba vite comme un soufflet. Le Norvégien rendit aussitôt son avantage. En fait, c'est terrible à écrire mais à partir de là, il n'inscrivit pas le moindre jeu du match.

Le 3e set ne fut qu'une lente exécution, au terme de laquelle Rafael Nadal a bouclé la quatrième finale la plus courte de sa carrière à Roland-Garros, après celles de 2008 (1h48 contre Federer), 2017 (2h05 contre Stan Wawrinka) et 2013 (2h16 contre David Ferrer). Il a donc décroché son 14e titre à Roland-Garros, et ce 17 ans jour pour jour après le tout premier, le 5 juin 2005. Il devient aussi, à 36 ans et deux jours, le vainqueur le plus âgé de l'histoire de Roland-Garros, dépassant le record de son compatriote Andres Gimeno, vainqueur il y a 50 ans, en 1972. La même année que Billie Jean King, qui lui a remis la Coupe des Mousquetaires.

La boucle est donc bouclée ? Pas vraiment, en réalité. Rafael Nadal l'a aussitôt annoncé dans son discours : contrairement aux rumeurs qui auront escorté son parcours, il a bien l'intention de continuer. À condition que son pied le lui permette, ce fameux pied qui le fait souffrir depuis presque toujours mais particulièrement depuis quelques semaines, au point d'avoir joué ce Roland-Garros, il l'a confirmé, sous anesthésiants.  

En attendant la suite, le voilà désormais à 22 titres majeurs, deux de plus que ses légendaires rivaux du Big Three, Novak Djokovic et Roger Federer, toujours bloqués à 20. Le voilà aussi, mine de rien, à mi-chemin du Grand Chelem, car c'est la première fois de sa carrière qu'il parvient à remporter les deux premières levées majeures de la saison.

Et puis, on va quand même le réécrire, parce que ça devient surréaliste : le voilà avec 14 Roland-Garros, soit l'égal du palmarès de Pete Sampras tous Grands Chelems confondus. Le record de l'Américain, scellé en 2002, semblait alors imbattable. Depuis, la tornade Rafael Nadal s'est levée. Elle a tout dévasté sur son passage.